Les questions des enfants autour de la naissance

Interview d’Edwige Antier, pédiatre, psychothérapeute, au sujet de son livre Sages paroles d’enfant.

Vous abordez dans votre ouvrage les questions des enfants autour de la naissance, de la sexualité et de l’amour. Quelles sont les grandes étapes de ce questionnement?

La résolution du complexe d’Oedipe vers l’âge de 5/6 ans marque une étape essentielle. Avant cet âge, l’enfant pense que sa maman fait les bébés toute seule. Il la voit comme une personne toute puissante. Il/elle ne sait pas très bien quel est le rôle du père. Garçon ou fille, il ou elle a bien envie d’aider sa maman à faire les bébés.

Après 5/6 ans, l’enfant a résolu le complexe d’Oedipe. Il/elle a intégré la présence du père et compris que le bébé était « fabriqué » par le papa et la maman. À partir de cet âge-là, il cherche davantage à comprendre le processus de la procréation: comment un bébé naît de la rencontre de deux cellules, comment se développe l’être humain.

Jusqu’où peut-on aller dans les explications?

L’enfant demande de la science et du sens, pas de la technique. Attention à ne pas donner d’explications pratiques, concrètes sur la sexualité et l’amour, mais à revenir à leur sens profond. L’enfant est dans une dimension existentielle: ce qu’il cherche à savoir au travers de ses questions, c’est la raison de son existence sur terre.

Les enfants sont-ils aujourd’hui mieux informés que ceux des générations précédentes?

Les questions des enfants

Non, les questions qu’ils posent aujourd’hui sont les mêmes qu’il y a 100 ans. L’imaginaire de l’enfant est universel et éternel. Ce qui a changé, c’est le vocabulaire employé par les enfants. Avec tous les moyens d’information existant à l’heure actuelle, ils captent des choses, dont ils ne comprennent pas réellement le sens. Ils ont une connaissance dispersée, un « vernis », mais ils ne sont pas plus savants qu’avant. On ne brûle pas les étapes de l’imaginaire enfantin.

Lorsque la vérité est très douloureuse, faut-il la dire? Prenons l’exemple d’un enfant dont le père est parti pendant la grossesse de la mère, d’un enfant dont l’accouchement s’est mal passé et a été très douloureux pour la mère?

Tout dépend du questionnement de l’enfant. L’important est toujours de revenir au sens profond des choses. Le père est parti pendant la grossesse? La femme doit retrouver la raison pour laquelle elle a conçu cet enfant avec cet homme-là et revenir à cette idée de départ. L’enfant a un père et il y a eu du désir à un moment donné.

L’accouchement a été très douloureux ? L’enfant le sait déjà, car bébé, il capte les émotions avant même de comprendre le sens des mots. Des expériences réalisées en maternité ont montré que lorsqu’une maman dit à la sage-femme qu’elle a encore mal, qu’elle souffre, le rythme cardiaque du bébé augmente. Si plus tard, l’enfant pose des questions du style « quand les bébés viennent au monde, est-ce que ça fait mal? », c’est qu’il a besoin de précisions. Peut-être cherche-t-il à savoir si sa mère lui en veut? Elle peut lui expliquer que lorsqu’un bébé sort du ventre de la maman, cela fait mal, mais que les docteurs sont là pour atténuer la douleur et que lorsqu’il naît, c’est tellement merveilleux, qu’elle est prête à refaire un autre bébé.

Propos recueillis par Anne Forestier

Pour en savoir plus:

Tous les samedis sur France Inter, Edwige Antier répond aux questions des auditeurs sur un thème.

Des livres pour les enfants:

Pour les 3/6 ans: Mademoiselle Zazie a-t-elle un zizi? de T. Lenain et D. Durand (Nathan).

Pour les 7/11 ans: Max et Lili veulent tout savoir sur les bébés de D. de Saint Mars et S. Bloch (Calligram).

Comment on fait les bébés, Babette Cole, Seuil Jeunesse

Des livres pour les parents:

Osez répondre aux questions de votre enfant du Dr M. Stoppard (Hachette).

Enfants, comment répondre à leurs questions! de M-F Vigor (J’ai lu).