Canons de beauté : pourquoi eux et pas moi ?

Elles sont longues et fines. Ils sont musclés et fermes. Qui ça ? Les « people » qui font rêver les jeunes. Ils ont l’air tellement heureux sur les photos qu’on aimerait leur ressembler. Comment les idéaux de beauté, prétendus source de bonheur, cassent-ils le moral des adolescents ?

« A l’école, tout le monde me trouve grosse alors que je me sens bien dans ma peau. Je vais être obliger de faire un régime », s’attriste Aude, 13 ans, face à cette dictature. « Je mesure 1m58 et 45 kg, je me trouve grosse ! », s’imagine Pauline, 14 ans. « Je mange tout le temps, je suis trop grosse, je n’arrive pas à maigrir, je n’aime pas les régimes. Tout le monde m’appelle grosse vache ! », désespère Marine, 13 ans.

Dans la tête ou réels, les kilos en trop rendent bien malheureux les adolescents. Les filles les premières. Car dans notre société, le comble du glamour et de la réussite, c’est l’extrême minceur des femmes et le corps musclé sans gras des garçons. « Je voudrais être parfaite extérieurement », lance Pauline qui pense tenir ici la clé du bonheur.

Difficile d’accepter un corps non conforme…

Point de départ des troubles alimentaires des adolescents : la transformation du corps et sa sexualisation. Les filles surtout. Soudainement, les rondeurs s’affirment. Oui, mais dans les magazines, elles ne sont pas comme ça ! Alors ce qui est normal devient insupportable. « Le problème est de retrouver une image acceptable et valorisée de son corps désormais sexué », analyse Serge Lesourd psychologue. « Difficile d’aimer ses formes quand la société impose la maigreur et l’androgynie ».

Pour aimer cette nouvelle image joliment arrondie, les garçons ne sont pas là pour filer un coup de main aux jeunes filles. « Il y a un très grand malentendu entre les deux sexes, estime le spécialiste. Les garçons sont souvent émus par ces corps de femmes. Le désir naissant en eux les trouble. Ils transmettent alors cette gêne à travers des mots parfois orduriers ». Premier miroir de son propre corps, le désir de l’autre est camouflé. On le croit inexistant. C’est la débandade.

… et parfois on le punit

Alors, on maltraite ce corps qui ne nous rend pas heureux. On le prive ou on le gave. « Je rêvais d’être grande et belle comme les mannequins. Quand j’ai su que je ne grandirai plus au-delà de 1m59, je me suis dit qu’au moins je ne serai pas grosse. J’ai commencé à faire un régime, et je suis tombée à 36 kg… », se souvient Céline, 17 ans, tout juste guérie d’une période d’anorexie.

« Dans l’anorexie, il y a le refus du désir de l’autre et l’exacerbation du sien en étant dans le manque », décrypte Serge Lesourd. En revanche, dans la boulimie, il y a ce besoin de se réassurer dans le plaisir de manger, le premier de notre vie. D’autres encore renforcent une image dévalorisée d’eux-mêmes et mangent pour compenser le manque affectif. Ils deviennent obèses. « S’accepter tel que l’on est, se dire « je suis comme je suis », est un signe de maturité. On ne peut pas demander cela à des adolescents », conclue le psychologue

En savoir plus…

A lire :

  • Anorexie et boulimie, Julia Buckroyd, éd. Poche
  • Anorexie, boulimie, obésité, Gérard Apfeldorfer, éd.Flammarion

Sur le Web :
www.boulimie.com
www.anorexie.com